Le coût des subventions aux entreprises au Canada
Les dépenses des gouvernements fédéral, provinciaux et locaux en subventions aux entreprises ont totalisé 352,1 milliards $ (ajustées en fonction de l’inflation) de 2007 à 2019. Pour mettre les choses en perspective, le Canada a dépensé 327,5 milliards $ (ajusté en fonction de l’inflation) pour la défense nationale au cours de la période en question, soit 24,6 milliards $ de moins que ce qui a été dépensé pour les subventions aux entreprises. De telles dépenses ont entraîné des coûts importants pour les contribuables canadiens et les budgets gouvernementaux. Compte tenu des déficits budgétaires continus et de l’efficacité discutable des subventions aux entreprises dans la perspective de réaliser une croissance économique généralisée, les gouvernements canadiens devraient réévaluer rigoureusement ce domaine de dépenses.
Selon un important corpus de recherche, il existe peu de preuves que les subventions aux entreprises favorisent une croissance économique généralisée et/ou la création d’emplois. En fait, les subventions aux entreprises pourraient avoir un impact négatif sur le développement économique, car les tentatives des gouvernements de choisir les gagnants en intervenant dans le libre marché auront finalement pour effet de fausser les décisions privées et de mal affecter les ressources. L’efficacité douteuse des subventions aux entreprises justifie un examen plus approfondi du coût des dépenses gouvernementales dans ce domaine.
Plus précisément, ce rapport impose un montant en dollars au niveau des subventions versées au moyen des dépenses gouvernementales de 2007 à 2019. Nous constatons qu’après ajustement en fonction de l’inflation, les subventions fédérales, provinciales et locales ont totalisé 76,7 milliards $, 223,3 milliards $ et 52,1 milliards $, respectivement. Il est important de noter qu’il ne s’agit pas d’une mesure complète du soutien apporté par les gouvernements aux entreprises, qui comprendrait tous les montants versés au moyen de dépenses fiscales, de garanties de prêt, d’investissements directs et de privilèges réglementaires accordés à des entreprises ou industries particulières. Le véritable niveau de soutien apporté par les gouvernements à certaines entreprises serait encore plus élevé.
Les contribuables assument en fin de compte le coût fiscal des subventions aux entreprises. Pour les Canadiens qui ont déposé leurs déclarations de revenus de 2007 à 2019, le coût des subventions totales par déclarant fiscal par province (en ordre décroissant) était : 18 785 $ en Saskatchewan, 18 334 $ au Québec, 14 811 $ à l’Île-du-Prince-Édouard, 13 285 $ en Alberta, 12 627 $ en Ontario, 11 573 $ en Colombie-Britannique, 11 290 $ au Manitoba, 8 511 $ en Nouvelle-Écosse, 7 057 $ à Terre-Neuve-et-Labrador et 6 048 $ au Nouveau-Brunswick. Il s’agit d’un montant important d’argent des contribuables qui n’est pas disponible pour les programmes et services destinés aux Canadiens.
Il est également utile d’examiner le coût des subventions dans un contexte budgétaire. Une façon d’y parvenir est d’évaluer les subventions provinciales comme une part des revenus tirés de l’impôt sur le revenu des sociétés correspondants de 2007 à 2019. Cela représente le montant des impôts qui pourraient être réduits ou même éliminés en l’absence de ces subventions.
Les résultats sont frappants, en particulier dans certaines provinces. L’Île-du-Prince-Édouard avait le plus haut niveau de subventions provinciales en tant que part des revenus tirés de l’impôt sur le revenu des sociétés, soit une moyenne de 162,9 % de 2007 à 2019. En d’autres termes, le gouvernement de l’Île-du-Prince-Édouard aurait pu éliminer tous les impôts sur le revenu des sociétés au cours de la période s’il avait mis fin aux subventions aux entreprises, auquel cas il serait resté encore de l’argent.
Deux provinces ont dépensé l’équivalent de presque tous les revenus tirés de l’impôt sur le revenu des sociétés sur les subventions provinciales. En moyenne, les subventions provinciales au Québec au cours de la période 2007-2019 représentaient 100,9 % des revenus annuels de l’impôt provincial sur le revenu des sociétés. Au Manitoba, le chiffre comparable était de 97,6 %. En d’autres termes, au Québec et au Manitoba, le gouvernement provincial aurait effectivement pu éliminer tous les impôts provinciaux sur le revenu des sociétés au cours de la période s’il avait également mis fin aux subventions provinciales aux entreprises.
La Saskatchewan et la Colombie-Britannique ont elles aussi engagé des dépenses relativement élevées en subventions provinciales en tant que part des revenus tirés de l’impôt provincial sur le revenu des sociétés. Les subventions provinciales en Saskatchewan (en moyenne) représentaient 88,6 % des revenus tirés de l’impôt provincial sur le revenu des sociétés. L’équivalent de près de neuf dollars en impôts sur le revenu des sociétés sur dix a été renvoyé aux entreprises sous forme de subventions de 2007 à 2019. En moyenne, les subventions provinciales en Colombie-Britannique représentaient 70,7 % de tous les revenus tirés de l’impôt provincial sur le revenu des sociétés, ce qui équivaut à plus de deux sur trois dollars de revenus tirés de l’impôt sur le revenu des sociétés renvoyés à certaines entreprises.
Les subventions aux entreprises représentaient environ la moitié de tous les revenus tirés de l’impôt sur le revenu des sociétés (en moyenne) en Ontario (46,1 %) et en Nouvelle-Écosse (47,6 %) de 2007 à 2019. Dans les trois provinces restantes, le Nouveau-Brunswick, l’Alberta et Terre-Neuve-et-Labrador, les subventions aux entreprises représentaient entre 30 et 40 % des revenus tirés de l’impôt sur le revenu des sociétés (en moyenne). L’impôt sur le revenu des sociétés aurait pu être réduit de manière significative si les gouvernements avaient mis fin aux subventions aux entreprises dans l’une de ces provinces.
De toute évidence, les subventions aux entreprises entraînent des coûts importants pour les contribuables canadiens et les budgets gouvernementaux. Dans la mesure où ces subventions ne comportent pas d’avantages économiques à grande échelle, comme l’indique la documentation, il s’agit d’un domaine clé pour la réforme des dépenses.